L'affaire McKinsey perturbe la campagne d’Emmanuel Macron.

 

Meeting d'Emmanuel Macron

L'affaire McKinsey va-t-elle se transformer en scandale politique et saper les chances d’Emmanuel Macron de remporter un nouveau mandat, comme le prédisent les sondages ?

Bien qu'il soit difficile de répondre à cette question, les conseillers d'Emmanuel Macron prennent au sérieux les accusations de cette affaire qui stipulent que le président a un peu trop sollicité les sociétés internationales spécialisées dans le conseil sans que ces dernières ne payent l'intégralité de leurs impôts.

L'affaire McKinsey a éclaté le 16 mars, lorsque le Sénat a publié un rapport révélant la "dépendance" de Macron à des cabinets de conseil privés, dont le cabinet américain McKinsey, spécialisé dans le conseil aux gouvernements et aux entreprises privées.

Le cabinet de conseil américain McKinsey. Surnommé “La Firme”, McKinsey a été sollicité pour la réforme des Aides Personnalisées au Logement (APL),  la gestion de la pandémie de Covid-19, notamment l’organisation de la campagne vaccinale ou encore pour préparer la réforme des retraites.

 

Des missions qui ont un coût (3,88 millions d’euros pour les APL, 12,33 millions pour la crise sanitaire), mais pas toujours de résultats concrets. Missionné pour intervenir auprès de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) dans le cadre de la réforme des retraites en 2019 et 2020, McKinsey facture sa prestation 957 674,20 euros. Mais la réforme est finalement reportée. De cette mission, il ne reste qu’une “présentation Powerpoint et un petit carnet de 50 pages”, selon Eliane Assassi, la rapporteure de la commission.

Pour couronner le tout : McKinsey, qui déclare un chiffre d'affaires de 329 millions d’euros en France pour l’année 2020, n’aurait pas payé l'impôt sur les sociétés depuis 10 ans. Soupçonné d’optimisation fiscale, le cabinet fait actuellement l’objet d’un contrôle fiscal, ordonné “avant le rapport” assure le ministre de l’Économie Bruno Lemaire. Mais selon la commission d’enquête du Sénat, les vérifications de Bercy n’auraient commencé qu’en décembre, après le début de ses travaux.

Le recours aux cabinets de conseils par les pouvoirs publics n’a rien de nouveau, mais les dérives pointées du doigt par le Sénat font tache, en pleine campagne présidentielle. Des millions d’euros injectés dans des projets de réforme jamais concrétisés, ou qui donnent lieu à des réductions d’aide pour les plus précaires, comme ce fut le cas avec la baisse des APL

L'hebdomadaire « Le Canard Enchaine » a publié un article dans lequel il confirmait que « les importants transferts financiers qui ont été effectués par la branche française de « McKinsey » vers la maison mère située aux États-Unis étaient censés attirer l'attention de la Direction Générale des Finances Publiques, d'autant plus que ces transferts financiers sont contrôlés par cette direction. L'hebdomadaire a conclu que McKinsey n'avait pas expliqué dans son rapport comment il évaluait ses profits.

L'organisation non gouvernementale "Oxfam" a ajouté que "McKinsey" Consulting Company a suivi une stratégie serrée pour empêcher le paiement de trop d'impôts sur ses activités en France. Par exemple, elle a inscrit certaines dépenses liées à l'administration générale dans la colonne des comptes de l'entreprise. Le but est de réduire l'impôt que cette entreprise payait. » Selon le journal Le Monde, McKinsey ne payait que 175 $ d'impôt nominal par an.

McKinsey a affirmé avoir respecté toutes les règles fiscales et sociales en vigueur en France et avoir acquitté l'impôt sur les sociétés pendant "les années au cours desquelles elle a réalisé des bénéfices en France". Mais malgré ces explications, le Sénat français a annoncé le 25 février avoir porté plainte contre le cabinet de conseil américain.

Selon le quotidien "Le Monde", un grand nombre de consultants qui travaillaient dans la société américaine "McKinsey" ont participé gratuitement à la campagne électorale de Macron en 2017. Après la victoire de Macron aux élections présidentielles, ils ont été nommés à plusieurs postes administratifs et gouvernementaux. .

Mais le camp Macron ne se laisse pas démonter. La réponse est offensive : invité de l’émission “Dimanche en politique” sur France 3, le 27 mars dernier, le président a démenti l’existence de “combines”. "S'il y a des preuves de manipulation, que ça aille au pénal", a lancé le chef de l’État, assurant que la transparence était complète et qu’aucun contrat n’était passé dans la République “sans qu’il respecte la règle des marchés publics”.

Une attitude qui n’est pas sans rappeler le “qu’ils viennent me chercher” lancé en pleine affaire Benalla, du nom de l'ancien garde du corps du président, qui avait frappé un manifestant en pleine rue, le 1er mai 2018

Perçue comme bravache par l’opposition, cette réponse du président s’inscrit dans une démarche de minimisation pour Pierre Bréchon. “La stratégie du gouvernement aujourd’hui c’est ‘circulez y’a rien à voir’”, explique le politologue, professeur à l’Institut d’Études Politiques de Grenoble.

 

Emmanuel Macron “a banalisé le phénomène. C’est une stratégie assez raisonnable, parce qu’on ne peut pas ne pas répondre : le président et tous ses soutiens sont bien obligés de répondre, ils sont attaqués. Mais face à l’attaque, la réponse est de dire qu’il n’y a eu aucune illégalité, que c’est un non sujet.”

Dans le même contexte, Amélie de Menchelain, ministre de la Transformation numérique et de la Fonction publique, a confirmé que "McKinsey n'a décidé de mener aucune réforme, car le dernier mot sur les réformes que nous entreprenons en France appartient toujours à l'État". Elle a poursuivi : "Nous n'avons pas été déchargés de nos responsabilités. Cette pratique est répandue et habituelle dans la plupart des cas."

Quant au ministre des Comptes publics, il a confirmé que "McKinsey ne représente que 5% des dépenses que l'Etat a consacrées au conseil et à la stratégie".

Il a ajouté : "La position fiscale de McKinsey est protégée par le secret fiscal. Mais nous avons ouvert une enquête fin 2021", tout en refusant de "commenter les répercussions de cette enquête", notant qu'"il n'y a rien à couvrir".

Est-il possible de reconsidérer la politique de traitement des partenariats de conseil ?

 

Amélie de Menchelain, ministre de la Transformation numérique et de la Fonction publique, a affirmé que "l'État français prend la responsabilité de recourir à ces bureaux de conseil". Mais elle a admis qu'"il est urgent de reconsidérer la politique de l'Etat à l'égard de ces entreprises", déclarant que "les avantages financiers versés par l'Etat aux cabinets de conseil étrangers seront réduits de 15%".

 

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