« Immigration et intégration » : l’Afrique redoute un exode plus massif de ses médecins
Le gouvernement prévoit la création d’une carte de séjour spécifique qui concernera notamment les médecins étrangers quelle que soit leur spécialité. L’Afrique francophone est le deuxième pourvoyeur de praticiens étrangers en France.
Alors que le projet de loi « immigration et intégration » doit être présenté en conseil des ministres, mercredi 1er février, le débat est monté sur le volet qui prévoit la création d’une carte de séjour spécifique pour les métiers en tension, au premier rang desquels ceux de la santé. En 2022, selon le Conseil de l’ordre des médecins français , les trois quarts des 2 000 praticiens à diplôme hors UE qui ont passé les épreuves de vérification des connaissances étaient originaires du Maghreb, et la moitié d’Algérie. Au total, l’Organisation de coopération et de développement économiques chiffrait à 25 000 le nombre de médecins nés à l’étranger qui exercent en France, soit 12 % du total d’inscrits à l’ordre.
« La plupart des futurs médecins arrivent pour suivre une spécialisation ou faire un stage. » « On est en train de fabriquer de futurs médecins clandestins qui ne rentreront pas chez eux», s’indigne Mohamed Ghannem, un spécialiste d’origine tunisienne qui dirige l’unité de cardiologie du centre hospitalier de Gonesse . Avec 16 % de médecins nés à l’étranger, elle est même en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE, qui est à 25 %. Le nombre de visas accordés aux jeunes Africains en formation a bondi de 32,5 % pour la rentrée 2020-2021, ceux d’Afrique subsaharienne de 41 % sur cinq ans, selon l’agence CampusFrance.
Les jeunes partent en masse, mais aussi les médecins installés depuis
plusieurs années, et même des seniors. « La France n’a pas su
former suffisamment de médecins pour son propre territoire et siphonne nos
praticiens en les payant moins à compétences égales, tranche Moncef Belhaj
Yahia, qui préside l’Association tunisienne du droit à la santé créée
après la révolution de 2011. » En 2021, l’Ordre des médecins
tunisien a enregistré 970 départs, contre 500 à 600
habituellement. « La Tunisie forme environ un millier de médecins par an.
Il y aura donc bientôt plus de médecins qui partent que de médecins
formés, se désole le retraité. Les talents qu’on a ici sont en quête
de meilleures conditions pour exercer leur art, témoigne Daniel Mabongo, président
du Syndicat des médecins du Cameroun, qui voit s’exiler chaque année un
tiers de ses spécialistes.
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