Le secrétaire général de l'Elysée... cette figure mystérieuse aux plus hautes fonctions de l'Etat.

 

Palais de l'Elysee

Aux yeux d'un grand nombre de Français, il est le haut fonctionnaire ascétique notant vite les noms des ministres debout au balcon de l'Elysée lors de l'annonce du nouveau gouvernement. De ces cérémonies figées, la confusion naît dans l'esprit du commun des mortels : le secrétaire général est une sorte de cadre supérieur et incontournable, chargé de tâches administratives ambiguës.

Mais en fait, le "secrétaire général" n'est que la deuxième personnalité de l'Elysée, juste après le chef d'Etat. C'est un homme qui vit dans l'ombre, un rouage indispensable de la machine de l'Elysée, le bras droit invisible du chef d'Etat, celui qui "voit tout, entend tout, mais ne dit rien", selon un dicton attribuée au général de Gaulle.

Le secrétaire général de l'Elysée est "celui par lequel passe tout ce qui concerne le président de la République, pas une virgule ne lui échappe", explique Emery Doligé, auteur de L'état-major invisible de l'Elysée (éd. Presse de la Cité). "C'est lui qui décide si l'information remonte ou pas au président ", il est comme la tour de contrôle dans le domaine des "relations publiques".

Le secrétaire général est un "chef-répéteur", dont le travail consiste à doubler l'efficacité du chef de l'Etat en lui faisant gagner un temps sur son emploi du temps quotidien chargé. C'est un véritable directeur de cabinet du gouvernement, il embauche les meilleurs, il coordonne avec le Palais Matignon (le Cabinet), gère les dossiers importants, prépare les procès-verbaux du Cabinet, supervise les nominations et les entretiens pour la Présidence, relit les entretiens avec les membres du l'exécutif, et arbitre. Dans les affaires pendantes, il transmet les arrêtés aux ministres et les reformule si nécessaire.

Chez les conseillers du président, ce pouvoir absolu dont il jouit suscite parfois jalousies et tensions, comme en témoignent les critiques acerbes dont il fait l'objet dans un article du journal "Le Monde", après avoir confirmé la reconduction de Alexeï Kohler, titulaire du poste, qualifié de “castrateur en chef” par un familier du Palais.

"Alexis Kohler est le deuxième cerveau d'Emmanuel Macron, celui qui empêche le président de dévier de sa feuille de route", explique Emery Doligé. "Parfois, les ministres ont des idées étranges et peu claires. C'est là que le rôle du Secrétaire général entre en jeu pour dire le dernier mot. Cela met également fin à l'aspiration des ministres à rechercher leur propre gloire."

Son bureau est situé au premier étage de l'Elysée à côté du « salon vert », la salle de réunion attenante au bureau du président, et ce préposé est le seul parmi le personnel présidentiel et les membres extérieurs à la famille du président qui ait un accès au chef de l'État.

 

Un travail très sensible, nécessitant que le titulaire ait beaucoup d'énergie pour l’accomplir. Le Secrétaire général est le premier du personnel à arriver au travail, et il est aussi le dernier à partir. Il est très instruit, souvent diplômé de la réputé Ecole national d'administration, et possède une connaissance approfondie du fonctionnement de l'appareil d'État et de ses composantes.

C'est généralement un ami fidèle du président, comme Jean-Pierre Jouyet dans l'administration de François Hollande, Claude Guéant dans l'administration de Nicolas Sarkozy, et enfin Alexis Kohler dans l'administration d'Emmanuel Macron... La confiance doit être absolue entre les deux parties, "C'est la personne avec qui le président passe le plus de temps. S'il n'y a pas d'appréciation mutuelle entre eux ou s'il n'y a pas de confiance intellectuelle et amicale dans leur relation, il y aura certainement un déséquilibre dans le travail entre eux », explique Emery Doligé.

Aucun texte juridique ne définit clairement le rôle du secrétaire général de l'Elysée, ce qui contribue grandement à l'aura d'ambiguïté qui entoure son rôle et alimente les illusions et les suspicions complotistes au sommet du pouvoir. En l'absence de ce cadre réglementaire pour cet emploi, il appartient au seul chef d'État d'en déterminer l'étendue.

Si le général de Gaulle a jugé nécessaire que ses secrétaires jouissent du secret, Nicolas Sarkozy a été tout le contraire, envoyant volontiers son secrétaire général Claude Guéant dans les plateaux de télévision pour défendre le travail de son gouvernement. Le surnom de Guéant "Vice-Président", car il était l'un des secrétaires les plus puissants de la Ve République, a souvent été accusé de saper le rôle du Premier ministre de l'époque, François Fillon.

Sous Chirac, le secrétaire général Dominique de Villepin était présenté comme le principal instigateur de la décision ratée de dissoudre l'Assemblée nationale en 1997. Bien sûr, il y en a qui étaient moins visibles, comme Jean-Louis Bianco en 1982 dans l'administration de François Mitterrand, il était la personne la plus jeune à occuper ce poste, pendant plus de neuf ans.

Quant aux fiduciaires de François Hollande, ils étaient presque tout le temps dans l'ombre. Dans un article le concernant publié par le journal « Libération » en 2018, Pierre-René Lomas, secrétaire général sous Hollande, expliquait avoir reçu une courte feuille de route précisant sa méthode de travail, résumée par la phrase suivante : «Ne pas être Guéant." En somme, le sens se résume à "N'empiètez pas sur le travail du Premier ministre ou du ministre de l'Intérieur". Puis il dit en expliquant : "Je n'étais personne". Et honnêtement, ce n'était pas facile."

Que le Secrétaire général soit un conservateur ou un habitué des médias, qu'il soit influent ou distant, il a généralement un bel avenir politique devant lui. Trois de ces secrétaires devinrent plus tard premiers ministres, à savoir pierre beregovoy, Dominique de Villepin et Edouard Balladur. En tant que secrétaire général de l'Elysée, Balladur était le confident secret du président Georges Pompidou.

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