Colère en Somalie : envoie de jeunes au service militaire en Érythrée secrètement.

 

Ali Jamak pensait que son fils était agent de sécurité au Qatar dans le cadre des préparatifs de la Coupe du monde de football 2022. Un jour d'avril, des responsables de l'Agence nationale de renseignement somalienne sont arrivés avec 10 000 dollars en espèces. Ils lui ont annoncé que son fils n'était pas mort au Qatar, mais en Érythrée, l'un des pays les plus secrets du monde.

«Ils m'ont montré une photo sur WhatsApp et m'ont demandé : 'Connaissez-vous le propriétaire de cette photo et son nom complet?' J'ai dit: «Oui, c'est mon fils». Alors ils m'ont dit : "Ton fils est mort". J'ai pleuré », a déclaré Jamak, 48 ans, à Reuters.

Les hommes lui ont donné de l'argent et lui ont dit de ne pas poser de questions.

Le fils de « Ali » était l'un des trois jeunes hommes dont les familles ont déclaré à Reuters que le gouvernement fédéral somalien les avait recrutés pour travailler pour des emplois au Qatar, mais ils sont apparus en Érythrée, où ils se sont rendus pour servir dans l’armée Erythréenne contre leur gré. Deux autres familles ont déclaré que deux de leurs fils avaient tout simplement disparu.

Ce recrutement probablement secret de jeunes Somaliens pour rejoindre une force de combat en Érythrée attise la colère du public en Somalie, un pays pauvre où tout le monde cherche des opportunités de travail à l'étranger. Des manifestations ont éclaté la semaine dernière dans la capitale, Mogadiscio, et dans les villes de Gori Ayel et Galcaio, en raison de la disparition de ces jeunes.

Les Somaliens étaient préoccupés par leurs enfants après les informations faisant état de la participation des forces érythréennes aux affrontements qui ont eu lieu en novembre dernier dans le nord de l'Éthiopie, ce qu'Addis-Abeba et Asmara nient fermement.

En réponse à la question de savoir si l'Érythrée avait recruté, formé ou envoyé des Somaliens en Éthiopie, le ministre de l'Information érythréen, Yamani Meskil, a déclaré à Reuters: « C’est une chose absurde ... il y a une désinformation médiatique généralisée ».

Le porte-parole du gouvernement somalien Muhammad Ibrahim et le ministre de l'Information Othman Dubaï n'ont pas répondu aux demandes de commentaires sur ce qui semblait être le rôle de Mogadiscio dans le recrutement de jeunes hommes. Ibrahim a nié avoir envoyé des Somaliens en Ethiopie.

Un rapprochement entre les dirigeants de la Somalie, de l'Éthiopie et de l'Érythrée a eu lieu depuis 2018, à la suite d'un changement de direction à Addis-Abeba. Ces derniers ont signé un accord de paix avec Asmara, après avoir été des ennemis acharnés, et échangent désormais des visites à un niveau élevé.

 

Mogadiscio entretient désormais des relations amicales avec le président de l'Érythrée, après que son pays ait été précédemment accusé de soutenir les combattants extrémistes.

Hussein et Rassami ont déclaré que son fils Saddam, âgé de 21 ans, s'était rendu pour travailler dans la sécurité au Qatar en octobre 2019. Aucune nouvelle ne lui était parvenue depuis plus d'un an. Enfin, il a téléphoné en novembre depuis l'Érythrée.

Son fils lui aurait dit : «Nous avons tous été choqués lorsque nous avons atterri en Érythrée. Nous pensions que nous allions nous envoler pour le Qatar. Mon père, il n'y a pas de vie ici. Je n'ai pas vu de nourriture sauf des miettes ou des tranches de pain depuis que j'ai quitté la Somalie en 2019. Et quand des recrues protestent ou refusent des ordres La réponse est une balle. "

Sahra Abdi Qadir, dont le fils Aqeel Hassan Abdi a disparu en 2019 dans des circonstances similaires, a déclaré à Reuters que son fils avait appelé en janvier et a déclaré qu'il se trouvait dans un camp dans un endroit inconnu en Érythrée.

Il n'y a pas de médias indépendants dans le pays, une nation qui n'a jamais tenu d'élections et qui obligent ses citoyens à s'engager indéfiniment dans le service militaire. La présidence est assurée depuis 1993 par l'ancien commandant du Front populaire de libération de l'Érythrée, Isaias Afwerki.

Quant à la Somalie, elle n'a bénéficié que d'un régime central limité depuis 1991.

Les deux pays ont une histoire de conflit depuis des décennies dans la Corne de l'Afrique, et leur plus grand voisin, l'Éthiopie, y a souvent été impliquée.

Un analyste de la sécurité de la région a déclaré, anonymement, à Reuters, qu'il avait appris lors de conversations avec des responsables de la sécurité à Mogadiscio qu'un millier de Somaliens transférés en Érythrée avaient été recrutés dans au moins trois groupes. Il a ajouté que l'un des groupes était rentré dans son pays et qu'il était impossible de contacter le deuxième groupe, alors que le troisième était toujours en Érythrée.

Reuters n'a pas été en mesure de confirmer ces détails.